mercredi 19 décembre 2018

la théière

Tout en blaguant et chantonnant, pour essentielle préparation, nous avons allumé le feu dans la cheminée.
Maintenant il parle.
Elle aussi – révèle tout son savoir, sa beauté, son harmonie. La lumière profonde sur son dos strié bleu de nuit s'épanouit, libère des galaxies mystérieuses. Elle avance son bec lisse, sinueux et poli comme sable du désert sous la lune, un bec d'argile, propice à recevoir l'ombre et le lait. Aussi ronde et pleine que les gouttes qu'on voit briller à la fenêtre, accrochées aux nus rameaux de l'églantier après la pluie. Aussi noire qu'elles sont blanches, luisant de la même profonde lumière, la tête d'oiseau s'érige au centre du col bleu noir parcouru d'un ondoiement concentrique de fines stries. L'objet théière est devenu un univers. Il parle une langue pleine, indéchiffrable, comme le feu.
Fascinant spectacle, musique envoûtante, qui ont pris la place des bruits et des paroles. Nous nous sommes effacés, glissés silencieusement sur nos feuilles de papier, au gré d'un stylo. Le monde entier nous est maintenant offert.

Ilse Bing self portrait with leica Paris 1931

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